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« A tout seigneur tout honneur : Matar BA aussi a fait son job ! » (Par Pape Khouma)

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« A tout seigneur tout honneur : Matar BA aussi a fait son job ! » (Par Pape Khouma)

Les fatalistes et autres mystiques diront qu’il porte bonheur au Sénégal, car depuis son avènement à la tête du ministère des sports, le sport sénégalais se porte mieux.

Les politiques revendiqueront une vision plus générale (celle du président notamment) ou un concours de circonstances favorables indépendantes des logiques politiques. Les rationalistes s’efforceront quant à eux à dépister des éléments objectifs qui peuvent sinon expliquer, du moins aider à comprendre les raisons des performances des différentes équipes nationales sous le magistère de Matar Ba. Ils auraient tous raison d’évoquer ces pistes de réflexion pour rendre intelligible cette éclaircie du sport sénégalais, mais il faits restent des faits et ils sont têtus. Pourquoi Matar Ba a autant duré à son poste pour un département réputé être celui des passions et des conflits ? La chance suffit-elle à expliquer cette réussite et cette longévité ?

C’est vrai que certains pourraient penser que Matar Ba est né sous une bonne étoile et ce ne serait pas forcément de la simple superstition. En effet, aussi bien sur le plan administratif que sur celui purement sportif, les résultats sont probants, indubitables. C’est vrai que les années 2000 ont amorcé une révolution dans la gestion des différentes fédérations sportives du pays relativement à la question de la constitution des équipes et à celle du paiement des primes. Ce processus s’est consolidé et affermi à partir de 2014 avec l’arrivée au ministère des sports de M. Matar Ba. Produit du mouvement associatif, très ancré et populaire dans le milieu Nawetane, l’actuel ministre des sports n’est donc pas en terrain inconnu. Sa trajectoire dans le milieu associatif lui a forgé une personnalité de fair-play, de diplomate dans un univers où la confrontation et la compétition requièrent un esprit de dépassement. Il va sans dire que sa personnalité très fair-play est une des clefs de son succès dans le règlement des tensions qui jalonnent souvent le monde du sport.

Les Libériens ont élu un ancien footballeur après la guerre et après avoir amorcé la voie de la démocratie. Ce choix peut paraître iconoclaste pour ceux qui pensent que la politique est une affaire de spécialistes, de personnes ayant fait leurs armes dans les méandres de la politique politicienne. Mais pour un peuple à la quête d’une unité et d’une espérance dans l’avenir, ce choix est loin d’être absurde. Il n’y a pas plus fédérateur que le sport, plus grand solide ciment et plus grande école diplomatique que lui. Un sportif est donc logiquement un bon diplomate et l’exemple de Matar Ba en est l’illustration.

Cet ex président de l’Organisme national chargé des activités de vacances (ONCAV) de 2008 à 2011 est passé de maire de la ville de Fatick à ministre des sports en laissant derrière lui l’image d’une personnalité de consensus, de négociateur rompu à la tâche. Le sport Nawetane est, en effet, plus populaire dans ce pays que celui professionnel. C’est dire si le succès dans cet univers bouillonnant de passion requiert beaucoup de patience et de savoir-faire diplomatique. Quand il a affirmé, il y a quelques mois sa détermination à faire homologuer le stade Abdoulaye Wade de Diamniadio, beaucoup de sénégalais qui passaient par l’autoroute Dakar-Diamniadio prenaient ses déclarations pour de la rhétorique politique destinée à une consommation pour la campagne électorale. Mais l’histoire lui a donné raison et de fort belle manière : c’est dans ce stade que le Sénégal s’est qualifié pour la deuxième fois consécutive à la coupe du monde.

L’on se rappelle le conflit entre Baba Tandian et la fédération de basketball : Matar a fait valoir tout son entregent pour éteindre ce feu dont les suites auraient pu impacter négativement dans ce secteur du sport sénégalais. Idem pour les remous qui ont fait frémir la Fédération Sénégalaise de Football. Au plus fort de la crise, il est resté sur les principes sans jamais prétendre prendre la place des fédéraux pour les décisions concernant le choix des dirigeants. Mais c’est surtout son optimisme qui charrie une culture de la confiance au sein de son département.

Dans une interview accordée au journal Sud Quotidien en date du 13 juin 2020 voici ce qu’il affirmait « « Depuis que je suis ministre des Sports, j’ai été trois fois chef de délégation pour une Coupe d’Afrique. A la Can en Guinée équatoriale, nous avons gagné deux matchs avec l’entraineur Giresse et on nous a éjectés de la compétition. Nous sommes revenus et on s’est séparé de l’entraîneur. Nous sommes allés en quart de finale au Cameroun et ensuite finalistes en Egypte. Je pense que nous allons remporter la Can à la prochaine édition. C’est un processus car on tire la leçon de ses erreurs. Il est temps que l’on soulève le trophée. Si les Sénégalais pensent que l’on peut remporter le trophée, c’est parce que nous disposons des joueurs qu’il faut. L’Etat met aussi les moyens en mettant les joueurs dans un standing digne des pays développés ». Un homme qui pense comme ça peut donner l’impression au profane de faire dans la prémonition, mais il n’en est rien. C’est juste ce qu’on appelle avoir de la vision, savoir se fixer des objectifs, planifier les moyens et stratégies qui doivent être mobilisés pour les atteindre et faire preuve de patience.

Pierre de Coubertin, fondateur des Jeux Olympiques modernes a dit que « Le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre. ». Un sportif est donc par vocation un homme de défi, un compétiteur aussi sur le plan de l’humanisme : affûter ses armes dans un tel univers est par conséquent la meilleure école de la vie. La longévité de Matar Ba dans ce département n’est donc pas un hasard : il a été préparé par son parcours pour manager ce ministère. Et son abnégation, son intelligence relationnelle universellement reconnue sont ainsi devenus des levains pour une culture de la performance sportive au Sénégal.

L’amateurisme administratif, la mal gouvernance, les problèmes d’intendance, le manque de rigueur dans la gestion des fédérations ont longtemps plombé le sport sénégalais. Et c’est précisément sur ce point que Matar Ba a accompli des performances quasi inégalées au ministère des sports. Se qualifier à la coupe du monde pour la deuxième fois consécutive après avoir remporté pour la première fois le trophée continental est le symbole de prémices prometteuses d’un renouveau du football sénégalais. Mais ces résultats n’auraient jamais pu être engrangés dans une situation de désordre, d’informel et de laxisme : même si le ministre Matar Ba est réputé être un bon diplomate, il reste un manager qui sait imposer la rigueur.

Le sport est aujourd’hui à la fois une industrie et un levier politique de premier ordre. Un homme politique qui néglige le sport ignore à quel point cette activité humaine est devenue importante pour tout pouvoir politique. Négliger le sport, c’est méconnaître l’énorme potentiel économique qu’il renferme et qui n’attend que d’être mis en valeur pour contribuer à la quête d’une émergence économique. Sur ce plan également Matar Ba se veut entreprenant notamment avec sa politique d’inciter les ASC à investir dans le domaine de la création d’activités économiques pour plus d’autonomie.

Il faut que les sportifs sénégalais aient une nouvelle conception du sport : c’est-à-dire à la fois un loisir et un business capable de faire travailler beaucoup de personnels qualifiés et de produire des richesses. Cette invite du Ministre prouve qu’il est très au fait de ce qui se fait de meilleur dans le monde. Dans les pays développés, il n’y a presque plus de frontière entre le sport et le tourisme, car certains grands stades d’Europe, les objets et symboles des grands clubs sont devenus des attractions touristiques. En incitant les responsables du sports et les Sénégalais à moderniser le sport, Matar Ba a posé les fondements de la rupture avec la conception crédule et informelle du sport qui a nous toujours inhibé dans les grandes compétitions internationales.

Mais le sport, c’est également et avant tout l’humain, des relations humaines, des sentiments comme la joie, la déception, la peine, etc. Savoir gérer le sport requiert donc une forte conviction humaniste : le sport doit rassembler, il ne doit pas diviser quel que soit le niveau d’adversité. C’est assurément sur ce plan que le ministre Matar Ba doit être félicité par l’ensemble des sportifs et, au-delà, par les citoyens sénégalais dans leur ensemble. Savoir se relever de certaines défaites est le premier pas vers la victoire.

La défaite du Sénégal en finale de coupe d’Afrique au Caire est restée au travers de la gorge de beaucoup de Sénégal, mais le discours de Matar Ba au lendemain de cette défaite a été plus que salutaire. Alors que les uns cherchaient un bouc-émissaire en la personne de l’entraineur et que les autres incriminaient le manque de concentration ou le problème de mental de nos joueurs, Matar a préféré mettre l’accent sur le parcours de l’équipe nationale. Il a évoqué le facteur chance qui, très souvent est négligé dans ce domaine, mais reste une réalité irrévocable. Dès l’instant qu’il y a des buts chanceux et des incidents malheureux dans le sport, il n’est plus possible de récuser l’argument de la chance pour justifier une déroute. En sport comme en science, il y a des incertitudes, des aléas qui peuvent à la dernière minute changer le cours du jeu et fausser tous les pronostics qui se fondaient sur la logique.

Les efforts consentis par l’Etat du Sénégal depuis des lustres ont tardé à porter leurs fruits et cette contre-performance chronique était en partie due à un défaut de rigueur et d’une culture de la planification. Le Sénégal n’a plus de problème de libération de joueur pour l’équipe nationale, ni de prime pour de match parce qu’il y a un changement de paradigme dans les budgets affectés au sport en général et au football en particulier : la notion de budget-programme et la professionnalisation de l’intendance de l’équipe nationale en sont pour beaucoup.

La discipline suit toujours l’attitude des décideurs, comme les lois celle des hommes chargés de les exécuter. C’est pourquoi le choix d’un dirigeant est toujours précédé d’une enquête de moralité qui, au-delà du sens premier de l’expression, doit prendre en compte la psychologie, la moralité, la personnalité et la capacité d’innovation et de résilience du concerné. Un leader qui s’emporte et prend des décisions sous le coup de l’émotion est un facteur de conflit et de régression alors qu’il est censé être un régulateur, un rédempteur pour sortir son monde du trou noir de la déception. La chance du Sénégal, c’est d’avoir un ministre des sports qui, au-delà des facteurs objectifs qui expliquent le succès de son département, est un modèle de sobriété et de force placide quelle que soit la circonstance.

Très ancré dans les réalités locales, Matar Ba est assurément un bon choix à la tête de ce département, car le sport est une manifestation de la culture, il en prote les empreintes indélébiles dans tous les pays. Comprendre les racines psychologiques des comportements des sportifs et des supporters est primordial dans la gestion du sport d’un pays. Or c’est sur ce plan que Matar Ba est imbattable : il a très compris que le sport dans ce pays doit certes être professionnalisé, mais ce serait une erreur monumentale d’en faire une affaire exclusivement réservée à des techniciens formés à la rationalité cartésienne.

Comme élément de la culture, le sport ne peut être une affaire des spécialistes uniquement. Les émotions et les croyances, ne se gèrent pas de façon exclusivement rationnelle, c’est à se demander même s’il serait raisonnable de les traiter rationnellement au regard de leur caractère rebelle à la rationalité. En optant de faire du fondement de la gestion du sport une synergie nationale à laquelle participent toutes les sensibilités, Matar Ba a permis de mobiliser toutes les énergies qui peuvent apporter au sport sa splendeur.

Au regard de toutes ces initiatives et des résultats déjà obtenus, on peut légitiment réclamer la même reconnaissance dont jouit aujourd’hui l’entraineur national pour le ministre des sports. Il est dans son élément dans ce département, mais ça ne l’a jamais empêché de faire preuve d’humilité et d’encaisser les critiques pour en faire une exploitation judicieuse. Les frémissements glorieux que notre pays est en train d’engranger lui aussi imputables, car un mauvais management déteint toujours sur la performance des acteurs, quel que soit le domaine.

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