Les cinq adolescents d’Andenne arrêtés après le jet d’une plaque d’égoût sur l’autoroute E42 qui a coûté la vie au routier roumain Gheorghe avaient passé la soirée sur le pont, selon les images de vidéosurveillance d’un riverain. Celui-ci raconte qu’ils avaient tiré des feux d’artifice dans les environs avant de se rendre sur le pont en voiture. Qu’est-ce qui leur a pris? Pour Hans Hellebuyck, psychiatre judiciaire, “Ils ont dû faire cela sous le coup de l’excitation.”
La prison à vie. C’est la peine maximale que risquent trois jeunes d’Andenne après avoir délibérément jeté une plaque en fonte d’un pont sur la E42 dans la nuit de vendredi à samedi. Un camionneur roumain, Gheorghe Tibil, est mort sur le coup quand la plaque d’égout – pesant environ 20 kg et pour 30 centimètres sur 60 – a traversé le pare-brise de son camion. Les deux mineurs du groupe – ils étaient cinq au total sur le pont – risquent jusqu’à 30 ans de prison si le tribunal pour enfants les remet à la justice et qu’ils sont jugés comme des adultes. Les cinq jeunes, tous originaires de la région, sont nés entre 2005 et 2006.
Sous l’emprise du gaz hilarant
Le parquet de Namur a ouvert une enquête pour meurtre immédiatement après les faits, estimant que les faits étaient prémédités. La bande de jeunes a enlevé le couvercle d’une bouche d’égout un peu plus éloignée, avant d’attacher leur projectile au pont à l’aide d’une courroie, puis ils ont attendu le passage d’un camion. Il est possible que ce soient les mêmes qui avaient jeté une autre taque d’égout sur la camionnette de Marian, au même endroit deux jours plus tôt. Le parquet ne peut le confirmer, mais le bourgmestre d’Héron Eric Hautphenne a confirmé que plusieurs taques semblables avaient disparu à proximité.
J’ai vu sur ma caméra que cette voiture est passée plusieurs fois vendredi soir. La police est venue récupérer nos images pour identifier le propriétaire du véhicule
Un riverain du pont
Filmés par la caméra d’un riverain
Les cinq jeunes ont été arrêtés dimanche soir, deux jours après les faits. L’un d’entre eux s’est rendu de lui-même. “C’est grâce aux images de la caméra que j’ai données à la police”, a témoigné à Sudinfo un habitant de la rue où se trouve le pont. “J’ai vu la voiture de ces garçons garée sur le pont ce vendredi soir. Tout au long de la soirée, ils ont régulièrement tiré de petits feux d’artifice, mais sinon je n’ai rien remarqué. Jusqu’à ce que j’apprenne la terrible nouvelle un jour plus tard, le samedi. J’ai vu sur une caméra chez moi que cette voiture était passée plusieurs fois vendredi soir. J’ai appelé le bourgmestre d’Héron, qui a prévenu la police. Ils sont venus récupérer nos images afin d’identifier le propriétaire du véhicule. Hier (lundi, NDLR.), les policiers nous ont rendu les images et nous ont remerciés : les garçons avaient été arrêtés en partie grâce à cette identification.” Les cinq adolescents sont tous originaires d’Andenne, à environ cinq kilomètres du pont. Ils n’étaient pas encore connus de la justice.
Les raisons pour lesquelles ils ont commis un tel acte ne sont pas claires, et on ignore s’ils sont passés aux aveux. Les suspects étaient sous l’influence du protoxyde d’azote, le fameux gaz hilarant. “Le protoxyde d’azote semble vraiment inoffensif pour les jeunes” déplore le toxicologue Jan Tytgat. “Ils se sentent langoureux, souriants et euphoriques. Mais ce gaz reste très dangereux. Il peut affecter les fonctions cérébrales et entraîner une perte de contrôle de ses actions.”
“C’est un véritable crime”
Selon Hans Hellebuyck, psychiatre judiciaire, les cinq étaient tout à fait conscients du danger. “Ils ont dû faire cela par pur plaisir”, explique-t-il. “Des gamineries? Certainement pas. Ce n’est pas une simple blague, même si le cortex préfrontal ne se développe pas avant l’âge de 25 ans, à 17 ans, on sait à cet âge-là à quel point ce genre d’acte est risqué. Ce n’est pas anodin, c’est un véritable crime.”
“Si l’on examine la moralité des cinq suspects, il est tout à fait probable que certains problèmes de comportement se répètent chez ces garçons”, ajoute Hans Hellebuyck. “Les individus qui commettent ce genre de mise en danger sont généralement antisociaux et peu empathiques. Bien sûr, certains ont pu se laisser emporter, mais ceux à l’origine de ce plan ne peuvent pas être de braves petits. Même s’ils sont encore inconnus des tribunaux.”