La nouvelle production du Sénégal arrive juste au moment où l’Europe cherche de nouvelles sources pour remplacer le pétrole russe sanctionné et que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés, appelés ensemble Opep+, prolongent les réductions de production jusqu’en 2024. Un contexte favorable alors que Woodside vient de lancer la commercialisation du brut issu du gisement de Sangomar.
Woodside Energy, l’entreprise australienne qui exploite le gisement pétro-gazier de Sangomar, a commencé à le commercialiser, a déclaré, mercredi 7 juin, à Singapour, Jeremy Soh, vice-président du groupe chargé de l’exploitation. Alors que les premiers barils de pétrole et de mètres cubes de gaz issus des blocs de Sangomar, à 100 km au sud de Dakar, sont attendus à la fin de cette année, il ne s’est pas avancé sur une date précise et n’a pas dit quand le premier cargo serait disponible. Des sources commerciales ont toutefois indiqué à l’agence Reuters que « l’objectif était d’ici fin 2023, bien qu’il soit plus probable que ce soit début 2024 ». La production de la première phase du développement du champ de Sangomar sera d’environ 100 000 barils par jour. Selon M. Soh, « les cargaisons de brut de Sangomar seront vendues sur une base free on board (Fob) ou livrées dans une taille standard de colis de 950 000 barils ». Par ailleurs, il a révélé les spécifications techniques du brut de Sangomar qui a « un grade moyen acide avec une gravité API de 32-33 degrés et environ 1 % de teneur en soufre ». Selon Reuters, « le brut de Sangomar pourrait séduire les raffineurs en Asie et en Europe, car la qualité du pétrole est similaire au brut d’Oman, généralement traité en Asie, et au grade Urals de Russie que l’Union européenne a interdit à la suite de la guerre en Ukraine ».
L’annonce de Woodside est une opportunité pour elle d’autant qu’elle devrait faire monter son cours en bourse. Le terminal du projet pourra charger le brut de Sangomar sur des pétroliers Suezmax qui transportent généralement chacun un million de barils de pétrole et des transporteurs très grands (Vlcc) d’une capacité de deux millions de barils chacun. Woodside détient 82 % de Sangomar, tandis que Petrosen est propriétaire des 18 %. Au Sénégal, le montant attendu de l’exploitation des hydrocarbures s’élève à 570 milliards de FCfa, représentant seulement 4,8 % des recettes fiscales et non fiscales de 12 000 milliards de FCfa espérées sur la même période, selon le rapport du Ministère du Pétrole et des Énergies pour l’examen du projet de budget 2023. Pour 2023, ces recettes se répartissent entre 90 % versés au budget général et 10 % pour le Fonds intergénérationnel.
231 millions de barils
Lors de la signature de la phase une du projet de développement du champ pétrolier Sangomar, les différentes autorités révélaient qu’elle viserait des ressources pétrolières estimées à 231 millions de barils (2P brutes, 60 millions de barils de réserves 2P nettes d’intérêt économique attribuées à Woodside) provenant du développement des réservoirs inférieurs, moins complexes, et d’une phase pilote initiale dans les réservoirs supérieurs. Grâce à cette première transformation de ressources en réserves pour le développement de Sangomar, les réserves de Woodside augmenteront de 60 millions de barils au niveau de confiance 2P.
Pour une redistribution des ressources de cette exploitation, le Président de la République avait rappelé, le 23 mai dernier, en Conseil des ministres, l’impératif pour les pouvoirs publics de veiller à « une affectation intégrale des fonds collectés par la future économie pétrolière du pays au budget de l’État ». C’est suite à des concertations consacrées à la gestion des hydrocarbures, en 2018 et 2021, que le principe de l’affectation intégrale des fonds collectés au budget de l’État avait été retenu. Le Président Macky Sall avait, dans la même dynamique, initié la création d’un Fonds intergénérationnel confié au Fonsis (le Fonds souverain d’investissements stratégiques », par le biais d’un mandat express de l’État. Une loi relative à la répartition et à l’encadrement de la gestion des recettes issues de l’exploitation des hydrocarbures à partir de la fin de cette année a été votée par l’Assemblée nationale. L’État travaille actuellement à stabiliser les projets du réseau gazier du Sénégal ainsi que le projet de document de la Stratégie nationale de développement du secteur pétrolier et gazier. Lors du lancement de la séquence 2023 du Dialogue national, le Chef de l’État a annoncé la tenue prochaine d’une session élargie du Secrétariat permanent du Comité d’orientation stratégique du pétrole et du gaz (Cos-Petrogaz) sous sa présidence.
Samboudian KAMARA Lesoleil.sn