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« LA CEDEAO : ENTRE LES COUPS D’ETAT POLITIQUES ET LES COUPS D’ETAT MILITAIRES, QUEL EST LA LEGITIMITE DE CES SANCTIONS ? »

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ICONTEXTE ET RAPPEL HISTORIQUE 

A la lecture du communiqué final du Sommet Extraordinaire des Chefs d’Etat et de Gouvernements de la CEDEAO et de l’UEMOA tenu à Accra le 09 Janvier 2022, les populations de l’espace Communautaire ont appris avec beaucoup de peine que nos Chefs d’Etat, viennent d’utiliser la force communautaire pour fermer les frontières du Mali avec l’ensemble de ses voisins membres de la CEDEAO que sont : le Niger, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée, et le Sénégal.

Comme vous le savez, le Mali lutte depuis plusieurs années contre les conflits internes multiformes ayant menacé l’intégrité de son territoire, suivi du fameux coup d’Etat de Août 2020. A ce sujet, le peuple malien est resté plusieurs mois dans la rue à constater le pouvoir civile démocratiquement élu, et c’est par cette situation que devrait commencer le questionnement de chacun et de tous :• Pourquoi le peuple manifestant ne voulait plus de cette démocratie incarnée par le Président Ibrahima Boubacar KEITA et son régime ?• Pourquoi les citoyens maliens ont-ils encouragé et soutenu l’arrivée des militaires à la tête du pays ?

Sans avoir la prétention de répondre à ces questions éminemment politiques, il est possible de comprendre, devant l’ampleur des sacrifices du peuple malien pendant des mois, le nombre de morts, de blessés et de personnes arrêtées, brutalisées et emprisonnées, tout cela disais-je n’a pas tempéré l’ardeur des maliens visant à mettre fin au pouvoir issu de la démocratie et des urnes si chèrement chantée par la CEDEAO. Pourtant elle s’est très peu préoccupée des préalables aspects politico institutionnels qui en garantissent la faisabilité et la légitimité à travers un écosystème caractérisé par une Bonne Gouvernance.

Ainsi, s’il y’a un principe respecté et adulé par le Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernements de la CEDEAO et de l’UEMOA, c’est de sanctionner sans délai les coups d’Etat militaires et de demander le rétablissement de la « démocratie et l’état de Droit » par des élections.

Là aussi, la CEDEAO n’a pas l’habitude d’interroger les contextes et d’en faire une analyse sérieuse pour s’assurer de la faisabilité ni de la qualité des élections.

Élections pour élections, même si on est tous d’accord que la démocratie est le système de dévolution de pouvoir politique moderne le moins mauvais. Dans les grands milieux universitaires, scientifiques et académiques, il s’agit de plus en plus de se questionner sur l’impact socio-politique des élections, la fiabilité de ses résultats chaque fois objet de contestations et de crises post électoralesredoutées par les populations. Également, si on observe certaines conditions dans lesquelles se déroulent les élections en Afrique il y a encore des défis importants à ce sujet.

Sous ce rapport, et au regard de tout ce qui précède, je commence à trouver réponse à la 2ème question à savoir « pourquoi le Peuple malien a préféré le pouvoir militaire actuel ? » Dans l’exercice du pouvoir, quels sont les fondamentaux qui intéressent un peuple ? on peut en retenir de façon non exhaustive la satisfaction des problématiques suivantes :• La paix et la sécurité• La justice équitable qui s’applique à tous• L’Éducation, la Santé et la sécurité alimentaire pour tous, etc.• La possibilité pour chacun de se déplacer, se vêtir, se loger faisant référence à la théorie des besoins primaires relatés dans la pyramide de Maslow

Concernant le Mali comme tout autre pays la capacité de répondre aux besoins ci-dessus cités est-il lié au statut militaire ou civil ? Je pense que Non

S’il était question de fiche de poste de dirigeant de pays africain, il nous semble qu’il y’a bien d’autres critères plus pertinents à mettre en avant pour élire un Chef d’État. Qu’en est-il des conséquences des manœuvres politiques sur nos Constitutions et de ses résultantes sur la qualité de l’expression fiable du suffrage universel direct ?  

Que dire de l’influence de l’argent dans la recherche du pouvoir et de l’effet de la corruption de l’achat de conscience, de la fraude et autres malversations politiques ?

Sans faire l’apologie du Pouvoir militaire contre la Démocratie, il s’agit de se poser les bonnes questions, quelles sont les conséquences d’une mauvaise Gouvernance politique dans la réapparition des coups d’Etat en Afrique.

IILES POPULATIONS FACE AUX SANCTIONS DE LA CEDEAO

Chers Lecteurs compatriotes africains, comment comprendre les décisions de la CEDEAO concernant le Mali et la Guinée ? Des sanctions sur des régimes qui n’affectent concrètement que les peuples au nom de qui leurs décisions sont rendues. Que cherche la CEDEAO si dénigrée et vilipendée par les populations, particulièrement quand leurs décisions tombent sur les Peuples impuissants ?      

Est-ce que le Traité de mai 1975 qui a créé la CEDEAO par les Pères Fondateurs avaient-ils mis l’accent sur la politique (l’exercice et la durée des mandats) ou sur la construction d’une Communauté Economiquement viable ? le Protocole additionnel a beau être important, il ne donne pas raison à l’insistance sans discernement de la CEDEAO à ne parler que d’élection et de mandat, en oubliant les vraies missions qui en sont les contenus substantiels qui concernent leurs mandants.

Il faut simplement constater pour le regretter, que la CEDEAO soit si rudoyée par le fait de comportements inappropriés, de plus en plus ces dernières années par le top management de la CEDEAO, qui d’ailleurs sur le sujet des élections ne traitant pas les pays d’égale dignité et de valeur selon les enjeux du polémique débat du 3ème mandaten Côte d’Ivoire et par ricochet en Guinée.

Malheureusement, cela a déclenché un sentiment de rejet de plus en plus prononcé contre la CEDEAO à cause de ses méthodes discriminatoires et démesurées à chaque coup d’Etat permettant à la France, à l’Union Européenne et les USA de se procurer le Droit de renchérir les sanctions de la CEDEAO contre les Peuples africains. C’est le lieu de rappeler que les corridors et les frontières appartiennent aux populations, les pouvoirs politiques délégataires de ces dernières, devraient bien réfléchir avant de procéder à de telles sanctions si sévères contre le Mali avec effet immédiat.

III. LE SOMMET DE ACCRA DU 9/01/22

A l’analyse des décisions du communiqué final du sommet de Accra qui a décidé de ce qui suit:

« De maintenir les sanctions initialement imposées à l’encontre du Mali et des autorités de transition. Elle décide également l’imposition de sanctions économiques et financières supplémentaires, conformément aux délibérations de sa soixantième session ordinaire tenue le 12 décembre 2021 à Abuja, en République fédérale du Nigeria. Ces sanctions supplémentaires comprennent :a) Le rappel pour consultations par les États membres de la CEDEAO de leurs Ambassadeurs accrédités auprès de la République du Mali ;b) La fermeture des frontières terrestres et aériennes entre les pays de la CEDEAO et le Malic) La suspension de toutes les transactions commerciales et financières entre les pays de la CEDEAO et le Mali, à l’exception des produits alimentaires de grande consommation; des produits pharmaceutiques ; des matériels et équipements médicaux y compris ceux pour la lutte contre la Covid 19 ; des produits pétroliers et de l’électricité ;d) Le gel des avoirs de la République du Mali dans les Banques centrales de la CEDEAO;e) Le gel des avoirs de l’Etat malien et des entreprises publiques et parapubliques dans les banques commerciales des pays de la CEDEAO ;f) La suspension de toute assistance et transaction financières en faveur du Mali par les Institutions de financement de la CEDEAO, particulièrement la BIDC et la BOAD».

La Conférence instruit les institutions communautaires à prendre les dispositions pour la mise en œuvre de ces sanctions qui entrent immédiatement en vigueur.

Pourtant le Sénégal, pays frontalier du Mali disposant du littoral maritime qui ravitaille le Mali, pays continental ; le Sénégal disais-je a ratifié depuis le 25/7/1981, la Convention des Nations Unies sur le Transport multimodal international des marchandises, de Genève (24/05/1980), visant à protéger les pays continentaux contre la fermeture volontaire des frontières par les pays voisins à littoral maritime.

Les conséquences et effets négatifs de la fermeture des frontières sont présentement ressenties par le Mali, mais pas seulement, le Sénégal aussi risque d’en payer le plus grand prix du fait de la relation fusionnelle entre le Sénégal et le Mali qui avait pourtant jeté son dévolu sur le port de Dakar pour tous ses approvisionnements essentiels et/ou subsidiaires.

Plus de 80% des denrées alimentaires du Mali viennent du Port de Dakar, tel que les leaders de notre région épris de justice et de paix ont déploré les sanctions au nom des citoyens maliens et sénégalais.

RECOMMANDATIONS

Afin d’aller vers un processus d’apaisement entre la CEDEAO et le Mali, il convient de poser certains actes allant dans le sens de rapprocher les positions à savoir :1. La CEDEAO doit repenser ses missions essentielles de développement moins politiques et s’occuper de l’Economie Communautaire qui était sa raison d’être en mai 1975 comme l’a souhaité les pères fondateurs2. S’agissant du Mali, la CEDEAO doit surseoir aux mesures du Sommet du 09/01/22 à Accra pour quelques 3 semaines le temps de trouver un consensus avec les autorités de la Transition3. La CEDEAO devrait à l’avenir prévenir les interlocuteurs et populations au moins pendant un délai de 10 à 15 jours avant de procéder à la fermeture de frontières et de corridors qui appartiennent aux peuples et non aux Gouvernements délégataires de pouvoir politique sensé travailler à son bonheur et non à sa détresse.

Vivement la CEDEAO des Peuples !


Mme Khady Fall TALL

Présidente Régionale de l’AFAO-WAWA 
Ex-Vice-Présidente de l’ECOSOCC/UA
Coordonnatrice ECOWAPP+10/CEDEAO 
Présidente Commission Genre 

et Promotion de l’Entreprenariat féminin de la CCIAD

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